Une grève illimitée affecte actuellement les trois géants de l’automobile américains, Stellantis, General Motors et Ford. Bien que les clients européens ne devraient ressentir que des perturbations minimes dans la production, les constructeurs, notamment le groupe dirigé par Carlos Tavares, risquent de subir des pertes financières. De plus, cette situation pourrait inciter les syndicats européens à s’inspirer de leurs homologues américains en envisageant des actions similaires.
Le salon de l'auto de Détroit perturbé
L’ouverture d’un salon de l’automobile peut être célébrée de diverses manières, mais l’UAW a opté pour la grève lors de l’inauguration de celui de Detroit le 14 septembre dernier. Depuis jeudi, une véritable bataille oppose Shawn Fain, le dirigeant du puissant syndicat américain de l’automobile, aux « Big Three » (Ford, Stellantis et General Motors).
Cependant, contrairement aux méthodes françaises, cette grève à l’américaine se veut pragmatique et axée sur l’aspect économique, selon le chef de l’UAW. Il a soigneusement choisi de paralyser une seule usine par constructeur, celle qui assemble naturellement les véhicules les plus vendus de chaque marque. Une grève illimitée ? Pas de problème, le syndicat a constitué une réserve de guerre de 825 millions de dollars pour couvrir les salaires perdus. De quoi être préparé pour l’avenir.
Cette grève qui oppose les acteurs américains de l’automobile ne devrait pas avoir un impact significatif sur les consommateurs européens ni sur les marques européennes. Les retards de production causés par ces arrêts de travail ne devraient pas se faire ressentir de ce côté de l’Atlantique. En ce qui concerne Stellantis, l’usine à l’arrêt se trouve à Toledo, dans l’Ohio, où sont fabriqués les Jeep Wrangler et Gladiator, qui ne sont pas particulièrement populaires sur les routes européennes. De même, l’impact est encore moindre en ce qui concerne General Motors, dont le pick-up Chevrolet Colorado, bien qu’il connaisse du succès aux États-Unis, n’est pas présent sur le marché européen.
En ce qui concerne Ford, la grève à l’usine de Wayne, qui assemble les Ranger et les Bronco, a un impact très minime en Europe. Le modèle Bronco n’est pas un best-seller dans l’Union européenne, contrairement au Puma, par exemple. De plus, le Ranger vendu en Europe est assemblé en Afrique du Sud. De plus, les constructeurs américains, tout comme leurs rivaux, ont anticipé cette grève en augmentant la production ces derniers temps grâce aux heures supplémentaires que les employeurs américains peuvent imposer à leurs salariés.
L’UAW prépare sa grève depuis des mois, mais les « Big Three » ont fait de même. En conséquence, chacun d’entre eux a constitué des stocks importants. Selon la direction de Stellantis, l’entreprise est capable de maintenir la production pendant 74 jours en cas de conflit prolongé. Chez Ford, ce chiffre s’élève à 64 jours, tandis que chez General Motors, il atteint 50 jours. Ainsi, quel que soit le déroulement de la situation, les clients européens ne devraient pas voir de prolongation significative des délais de livraison de leurs nouvelles voitures américaines pour le moment.
Des pertes financières significatives
Cependant, un problème auquel les constructeurs pourraient être confrontés dans les mois à venir est une baisse de leur chiffre d’affaires. Selon la Deutsche Bank, cette baisse pourrait atteindre entre 400 et 500 millions de dollars par semaine, ce qui pourrait finir par coûter très cher. Bien que, pour le moment, l’UAW ne généralise pas sa grève et la limite à une usine par constructeur, la menace plane. Si ses revendications ne sont pas satisfaites, le syndicat envisage de lancer une action plus étendue, touchant toutes les unités de production. Les revendications sont substantielles, car Shawn Fain et ses représentants réclament une augmentation de salaire de 46%.
La direction américaine de Stellantis a déjà accepté une hausse de 21%, mais cela est jugé insuffisant pour le moment. Ainsi, le bras de fer se poursuit, mais il est probable que les deux parties finissent par revoir leurs prétentions à la baisse. Si elles parviennent à s’entendre sur des augmentations comprises entre 25 et 30%, les syndicats européens du groupe pourraient alors envisager de réclamer des hausses salariales plus importantes, d’autant plus qu’ils n’ont obtenu que 4,5% cette année.
Il est important de noter que les excellents résultats de Stellantis, atteignant 16,8 milliards d’euros lors de l’exercice 2022, ont été largement attribués au succès des marques américaines du groupe. Cela confère aux hommes de Shawn Fain une position de supériorité par rapport à leur direction, contrairement aux syndicats européens.